lundi, décembre 27, 2010

LEGACY de Michael Wood: un des meilleurs documentaires sur la Chine en tant que civilisation

Dans la série de six parties sur les grandes civilisations, je viens de revoir avec grand plaisir (sur écran de 55 pouces d'un téléviseur Sony de plus de 5 000 $) les 51 minutes consacrées à la civilisation chinoise. Pas haute définition, parce que datant d'une dizaine d'années, mais le contenu vaut son pesant d'or! LEGACY, un des meilleurs, sinon le meilleur documentaire sur le sujet. Dans la version dvd (athenalearning.com), les sous-titres sont très utiles pour mieux suivre les commentaires de l'historien Michael Wood. Ce Britannique a l'avantage d'être dynamique, vivant et convaincant. Presque amical!

Les magnifiques images nous transportent à Pékin, Anyang, Xian, Kaifeng, Suzhou et Quanzhou pour une vue d'ensemble du pays. Michael Wood tente d'illustrer à sa façon le principe du «Mandat du ciel». Il fait appel à Confucius et à sa recherche de la société juste, stable et morale fondée sur le respect mutuel et la confiance. Un autre philosophe, Lao Zi, recherche l'harmonie avec la nature. Le Bouddhisme introduit le concept de la vie intérieure à partir de 79 000 manuscrits transportés par un moine itinérant.

Plusieurs sujets abordés

Pas un film expliquant seulement les trois grandes philosophies, mais des éléments visuels rappelant l'exploration du grand navigateur Zheng He qui se rendit notamment à Cochin (au Kerala actuel en Inde) longtemps avant le Portugais Vasco de Gama. Michael Wood, en bon vulgarisateur nous fait aussi entrer avec lui dans une pharmacie de Pékin pour faire comprendre l'écriture des milliers de caractères millénaires. Des sujets aussi terre à terre que la cuisine sont aussi abordés avec l'animateur assis à une table de restaurant et parlant de poésie de Li Bai. La route de la Soie a aussi sa place pour expliquer les relations suivies de l'empire chinois avec les autres grandes cultures.

J'aime bien les commentaires de l'historien d'Oxford sur la guerre de l'Opium condamnant la Grande-Bretagne pour son trafic honteux de la drogue aux dépens de la population chinoise. Il ose avancer un parallèle moderne avec la Colombie et les États-Unis pour montrer le caractère diabolique de cette entreprise. Il dira dans une autre partie de la série que les Occidentaux ont représenté la civilisation la plus agressive. Je recommande fortement ce document visuel à tous ceux qui désirent commencer à «comprendre» la Chine. Plaisir des yeux et plaisir de l'esprit!



jeudi, décembre 23, 2010

Le chinois, la 5e langue enseignée aux États-Unis, selon une vaste enquête récemment publiée












Je suis actuellement en voyage au Texas pour Noël 2010 et je trouve un article très intéressant dans le Dallas Morning News. Depuis 1958, la Modern Language Association of America (MLA) examine de près quelles langues autres que l’anglais sont enseignées aux Etats-Unis. L’espagnol, le français et l’allemand demeurent les trois langues les plus populaires. Le langage des signes occupe la 4e place. L’italien, le japonais et le chinois forment le groupe suivant. L’arabe est monté de peu vers la 8e place. Le portugais occupe une place confortable.

Comme je le constate tous les jours ici à Austin ainsi qu’ailleurs à San Antonio et Houston, l’espagnol occupe une place prépondérante dans la vie quotidienne. Pas moins de 34 millions de personnes parlent cette langue chez l’oncle Sam, y compris 3,5 millions de non-Latinos, ce qui fait des Usa un pays de taille dans cette langue. Étonnant!

L’espagnol compte 850 000 étudiants, soit de loin la part du lion. C’est quatre fois plus que le français avec 210 000 étudiants, un chiffre quand même réconfortant pour les promoteurs de la francophonie. L’allemand suit de très près avec 198 000 étudiants.

61 00 étudiants en chinois

Dans un autre article de mon blog, je rapportais que le chinois est aussi la 5e langue étrangère enseignée en France. Aux Etats-Unis, ils sont 61 000 à piocher en mandarin sur les milliers de caractères. À noter que la langue chinoise y a fait un bond popularité de 18% en 2009, soit un des pourcentages les plus élevés de la série (contre 46% en arabe). Il y a 30 ans, seulement 1 844 élèves s’adonnaient à la langue de Confucius. Dix ans plus tard, en 1990, ils étaient presque 20 000. En 1998, le groupe de sinophiles passait à 28 000. Donc de grands bonds récents montrant que les jeunes Américains s’ouvrent à la culture du pays le plus peuplé au monde.

Soit dit en passant, le portugais enregistre aussi un progrès notable avec un bond de 11%. Ils étaient 4 894 à l’étudier en 1980 et selon la MLA, ils sont maintenant 11 371 à s’y intéresser. En excluant le langage des signes et les langues mortes comme le latin, le portugais occupe la 9e position parmi les langues les plus enseignées. Un nombre relativement encourageant pour la Lusophonie.

Facebook en Chine

Pour plus de détails, il faut consulter les tableaux du dernier rapport d’une quarantaine de pages de la MLA (www.mla.org) dont les méthodes et la minutie méritent le respect. En automne dernier, 2 514 sur 2 802 institutions d’enseignement de niveau postsecondaire (comprenant colleges et universités) ont participé à l’enquête et le recensement de 2000 a aussi été pris en considération.

Ces données nous parviennent au moment où le jeune fondateur de Facebook se trouve en mission d’exploration en Chine populaire (mais officiellement «en vacances» seulement). On sait que Mark Zuckerberg étudie actuellement le mandarin à raison d’une heure par jour, sans aucun doute avec l’encouragement de sa copine chinoise Priscilla Chan. Le populaire personnage (550 à 600 millions d’adeptes) suscite de nombreuses spéculations sur l’influence qu’il pourrait avoir sur les 420 millions d’internautes chinois. Facebook est déjà disponible en 70 langues, y compris le chinois mais sans beaucoup d’adeptes dans ce cas. Voit-il rouge? L’expérience de Google? Censure gouvernementale?

Le sujet des langues dans tous les pays suscite intérêt, surveillance et même passion. Par exemple, le gouvernement de Pékin vient d’émettre une directive limitant l’usage de mots anglais dans ses publications, rapporte la toile d’Aujourd’hui la Chine. C'est en tout cas ce que pensent les législateurs chinois, qui viennent de prendre une nouvelle mesure pour protéger la langue nationale, dénaturée, selon eux, par l'utilisation courante de termes anglophones dans la presse. Selon l'Administration Générale de la Presse et des Publications, à l'origine de la loi, l'usage fréquent de mots anglais et d'abréviations dans les textes en mandarin ont créé de la confusion, et représentent des «abus de langage». La langue chinoise est-elle menacée de perdre sa pureté?

Enfin, pour compléter ces résultats sur le statut du chinois en France et aux Etats-Unis, j’aimerais bien en savoir autant pour le Canada et le Québec. À l’aide!

mercredi, décembre 08, 2010

Joe Wong, humoriste plus américano que sino (malgré le patronyme): à découvrir!


Le dénommé Joe Wong est arrivé aux États-Unis à l’âge de 24 ans et le jeune studieux s’est mérité un doctorat en biochimie à l’Université Rice (Houston), ce qui était plus que suffisant pour assurer son avenir. Après avoir déménagé du Texas au Massachusetts, le diplômé a suivi un simple cours d’adulte en stand-up, soit bien peu pour réorienter sa carrière. Son anglais n’était pas époustouflant, mais l’envie de faire libérer les endorphines continua de motiver le jeune scientiste -- autrement occupé à lutter contre le cancer.

De scientifique à comique

Joe Wong avoue avoir mis sept ans et demi à polir les plâtres avant de faire une simple apparition de cinq minutes au Late Show de David Letterman. C’est un succès immédiat : ce tremplin médiatique le lance dans une tournée de quelques villes. La vidéo de sa prestation montre un immigrant chinois s’accrochant à son texte malgré un accent tenace. Son physique le fait paraître dans la vingtaine (la moitié de son âge) et son allure de jeune débutant inoffensif sur la scène le rend sympathique. Une bonne dose de dérision. Le regard d’un nouvel arrivant sur l’American way of life.

Pour bien saisir le personnage, le scientifique devenu comique, vaut mieux visionner sa prestation -- beaucoup plus substantielle -- au chic banquet annuel de la Radio and Television Correspondents’ Association (RTCA). Devant un auditoire qui en a vu bien d’autres en matière de divertissements, l’étonnant docteur Wong manie avec brio l’art de la réplique. De l’avis des observateurs, un humour plutôt cérébral supposant un certain quotient intellectuel chez les intéressés -- familiers avec la culture de l’Oncle Sam. Des blagues à retardement. Des pauses calculées. Joe Wong peut aussi compter sur l’effet de surprise : les humoristes chinois carburant à la sauce américaine sont si peu nombreux. Chose certaine, visiblement, le vice-président Joe Biden (conférencier invité) et les autres convives s’amusent ferme. Bonne chimie!

Pas compris en Chine

Plus sûr de lui, bougeant mieux, demi-sourire aux lèvres, Joe Wong enfile les gags comme des perles. Réchauffement climatique, mariage, Benjamin Franklin, le réseau PBS et Twitter. Il encourage le bilinguisme chez son fils (né en sol américain) s’il veut plus tard accéder à la Maison-Blanche : l’anglais pour signer les textes de lois et les chinois pour parler au percepteur d’impôts -- allusion directe à la dette nationale contractée envers la Chine. Il rapporte avoir eu incrustés sur le pare-choc de sa voiture d’occasion plusieurs autocollants dont un menaçait: «Si vous ne parlez pas l’anglais, retournez chez vous.» À son insu. Il lui a fallu deux ans pour s’en rendre compte. Chaque fois qu’il cible un point négatif de son pays d’adoption, il contrebalance aussitôt avec un positif.

Notre homme dont le vrai nom est Huang Xi (littéralement : Jaune Ouest), originaire du Nord-Est, intrigue ses propres compatriotes de l’autre côté du Pacifique, incapables de comprendre son humour 150 % étatsunien. Des blogueurs chinois se sont donnés pour tâche d’expliquer et d’interpréter le contexte. Un show donné au théâtre Haidian de Pékin n’a pas été une grande réussite, selon l’avis même de l’humoriste Ding Guangquan. Pour sa part, dans son Jilin lointain, le père de Huang Xi, ingénieur à la retraite, souligne bien le yin et le yang du biochimiste montant sur les planches: «C’est comme une poule noire qui pond un œuf blanc.» Exactement comme la mère de Woody Allen estimant qu’il aurait été plus heureux s’il était devenu devenu pharmacien.

samedi, décembre 04, 2010

«Pas facile le travail en groupe chez les Chinois», selon le journaliste Zhao Jian

Il y a une dizaine d’années, lorsque mon ami Zhao Jian a lancé son tout nouveau hebdomadaire, j’allais souvent à l’imprimerie en pleine nuit pour tenter de l’aider dans sa communication avec les ouvriers de la compagnie près de chez moi. Un jour, je lui ai dit qu’il était le patron et qu’il devait vite former une bonne équipe et «déléguer» pour bien gérer Sino-Québec. «Non, me répondit-il, les Chinois ne sont pas capables de travailler en groupe. Très difficile.» Sa réponse m’est restée à l’esprit et m’a longtemps intrigué.

L’autre soir, autre décennie, je l’ai invité à me rencontrer pour en discuter. Une rare rencontre entre nous. Nous devrions nous voir plus régulièrement. Son explication commence par un proverbe : «les Chinois sont contents et satisfaits quand ils ont une terre, une femme et un fils». Rien de plus! Ainsi, selon lui, dans un pays de tradition agricole, il n’y a pas cette habitude de travailler en groupe – contrairement aux pays industrialisés où il y a des chaînes de montage.

Des associés se séparent

Zhao Jian ajoute une anecdote personnelle qui l’a visiblement marqué. «Avant de venir à Montréal, j’ai ouvert une compagnie avec trois confrères d’université dans le secteurs des affiches électroniques. Nous avions un bon chiffre d’affaires et c’était prospère. Mais nous n’avions pas établi les règles du jeu au départ. Quand est venu le temps de partager des profits, chacun disait qu’il avait travaillé et contribué plus que les autres. On a dû se séparer. Finie la compagnie!»

Mon objection : les Occidentaux ont nettement l’impression que le groupe prédomine sur l’individu en Chine et dans les pays voisins comme le Japon? Oui, les Japonais sont unis comme nation. C’est d’ailleurs ce qui fait peur aux Chinois, militairement parlant -- cette unité. Les Japonais peuvent fonctionner en groupes. Les Américains ne sont pas unis du tout entre eux. Les Canadiens non plus.

Mais est-ce que tant d’années de communisme n’ont pas forcé les Chinois à travailler en groupes, en unité de travail (danwei) plutôt qu’individuellement? Ici, la réponse de Zhao Jian est directe et simple : «Le communisme est un échec en Chine!» En d’autres termes, rien de changé à la tradition! Marx n’est pas soluble dans le thé!

Qui est plus individualiste?

Le fondateur du journal va encore plus loin en affirmant que les Chinois sont «très individualistes». Affirmation pour le moins étonnante de sa part, car ce sont bel et bien les Occidentaux qui sont perçus comme individualistes : la philosophie grecque (comme l’explique Richard E. Nisbett dans The Geography of Thought -- 2003), la Révolution française, les droits de la personne, etc.

Et pourtant, comme patron d’un hebdo depuis 2001, mon ami doit bien avoir une équipe sous ses ordres pour faire fonctionner l’entreprise? «Exact», répond-il. Comment gère-t-il ces quatre-cinq personnes à temps plein pour que ça marche aussi bien? Ses principes de gestion pour le team work? «Très simple, je les paie bien. Plus que dans les autres journaux chinois montréalais.»

Pendant la conversation, il invoque une autre raison déterminante : «Avec la politique de l’enfant unique, les jeunes n’ont plus de frères ni de sœurs. Y sont pas habitués à composer avec les autres.» Ils n’ont que les parents et les quatre grands-parents pour s’occuper d’eux. Bref, selon l’expression consacrée, le petit empereur, chouchouté par six adultes,.

«Il n’y a pas de grandes compagnies en Chine, poursuit le gars originaire du Hebei. Tu peux m’en nommer?» Il y a bien Haier et Lenovo. Pour lui, les seules grandes compagnies sont des sociétés d’État. Rien de semblable à Coca Cola, par exemple. Ailleurs, à Taiwan, oui, autre type de société, il y en a de grandes compagnies comme Acer. Au Canada, il y a T & T, (fondée par une Taiwanaise), qui en mène large dans l’alimentation. (Inconnu au Québec.) Loblaws vient de l’acheter.

Un homme discret

Sinon, en Chine, très important, conclut l’entrepreneur Zhao Jian, détenteur d’un bac. En électronique, les compagnies fonctionnent sur le modèle de l’entreprise familiale. Le père tire toutes les ficelles et quand il y a transfert de pouvoir, ce sont les fils qui assurent la relève.

Zhao Jian pousse le bouchon un peu plus profond en qualifiant les Chinois de Montréal d’«égoistes». «Plusieurs ont très bien réussi ici et ont fait de l’argent, mais personne n’a daigné contribuer à la communauté ni à la société d’accueil.»

Dans Le guide du Montréal multiple, dont elle est co-auteure, Laura-Julie Perrault fait remarquer que Zhao Jian publie un journal d’une trentaine de pages avec un tirage de 10 000 copies – le tiers du chiffre du Devoir. En entrevue, il a là aussi insisté sur la division de la communauté chinoise de Montréal. Une communauté «divisée… avec 300 associations». Faut construire des «ponts» entre les différentes générations, les vieux et les nouveaux immigrants, par exemple. Je suis content que la journaliste de La Presse ait suivi mon conseil de prendre le soin de recueillir son témoignage. Dommage qu’il soit si discret!

vendredi, novembre 26, 2010

Grande muraille visible de l'espace? NON!


Un astronaute canadien réfute de façon catégorique et détaillée une «légende urbaine»... longuement coulée dans le béton. IMPOSSIBLE de voir la Grande muraille à l'oeil nu du haut de l'espace! Le colonel Chris Hadfield qui a déjà participé à deux missions (1995 et 2001) et fut le premier Canadien à marcher dans l'espace vient de planter un clou dans la légende urbaine faisant croire que la Muraille de Chine est la seule construction humaine visible du haut de l'espace. L'astronaute qui commandera un station spatiale internationale en 2012 pour y rester 6 mois donne plusieurs détails contre la théorie chère à beaucoup de Chinois. Le mythe est tenace et a été repris par plusieurs auteurs.

Plusieurs raisons: étroite et camouflée

Selon Chris Hadfield en entrevue à la radio de CBC (novembre 2010), il y a plusieurs raisons. D'abord la Muraille (longue de 8-9 000 km, selon ses chiffres) n'a qu'une largeur maximum de 9 mètres et à des endroits pas plus de 5 mètres. Elle est construite avec des matériaux comme la brique, la boue et la terre pris à même les éléments locaux. La même couleur. Et ça suit le relief du terrain. Bref, c'est du vrai «camouflage». En fait, ce serait difficile de la voir du haut d'un avion. Encore moins à la hauteur de la capsule de 400 km. Très longue, mais trop étroite et mauvaise couleur! C'est comme s'ils ne voulaient pas qu'on voit leur monument antique.

Le scientifique canadien ajoute être allé comme touriste sur la muraille il y a quelques années. La guide lui répétait avec confiance qu'ils marchaient sur une des deux célèbres structures «visibles de la lune». Chris Hadfield lui a demandé quelle était l'autre. Réponse laconique: «Je ne sais pas!»

Faut un contraste pour voir

Le spécialiste de l'exploration spatiale explique les conditions pour qu'une structure ou autre chose soit visible. Il faut un contraste marqué de couleurs ou de forme comme le port de Toronto et celui de Vancouver où ça ressort clairement. En plus, le port de Tokyo. Les stades sportifs avec un toit brillant et un grand stationnement voisin.

Comme pour ajouter l'insulte à l'injure, Chris Hadfield donne des exemples autres de ce qu'il est possible de distinguer du haut du firmament. La transcanadienne à cause de son tracé droit qui coupe dans le paysage. Les endroits verts dont on a coupé la végétation pour installer des pylônes parce qu'il y a surface contrastée et différence de couleur. Les rayons du soleil y sont captés différemment.

Plus surprenant, le long sillage laissé dans l'eau par les navires est visible pour les même facteurs -- des reflets différents -- et permet de deviner la position du vaisseau (trop petit pour le voir à l'oeil nu). Les villes? À cause de la pollution, ce sont souvent de grandes taches, donc difficiles à observer à travers la couche ainsi produite. À moins que le vent dissipe tout ce qui les couvre et fasse apparaître l'«immense ruche humaine».

Enfin, pour revenir aux monuments historiques faisant l'orgueil des générations de descendants, l'honneur ne revient pas à la Chine mais à l'Égypte antique. Les pyramides ne sont pas visibles, mais au lever et au coucher du soleil, non loin du Caire, cause de la hauteur, les gens de l'espace en voient les «immenses ombres se profilant sur le sol comme de grands triangles». C'est extraordinaire de poser les yeux sur une construction datant de milliers d'années à partir d'une des merveilles de la plus récente technologie. «C'était pour moi un lien profond entre la passé et l'avenir», de conclure le militaire né en Ontario en 1959.

L'importance inouïe de sauver la «face» dans une dure prison de Thaïlande


Le concept de la «face» -- c'est-à-dire en donner, la sauver ou bien la perdre -- est profondément ancré en Asie. De son expérience personnelle, Roland Parisien m'a raconté des souvenirs de ses années d'incarcération en Thaïlande. J'ai fait appel à ce Montréalais parce que je connais bien l'histoire de ses sept ans et plus de séjour forcé au pays des Éléphants. Je lui ai rendu visite dans la prison de Bangkwang et je l'ai aidé par mes articles dans La Presse à retrouver la liberté à la fin des années 1980. Il en avait assez bavé dans ce pénitencier -- véritable trou pour exploiter les étrangers et leur fournir plus de drogue pour en tirer encore plus d'argent provenant de leurs familles.

Son anecdote la plus étonnante concerne les détenus condamnés à de lourdes sentences et même à la peine capitale qui affichaient ensuite au retour du tribunal la plus totale «indifférence, l'insouciance. Presque le sourire! Comme un p'tit coq! Ça m'dérange pas! La peine pouvait aller jusqu'à 25 ans. Pourtant, les damnés, surtout des Thaïs, affichaient de l'indifférence vis-à-vis des codétenus. Du moins le silence. Au risque de perdre la face. Mode de vie, éducation, tradition?»

Condamnés à mort mais souriants

«Les condamnés à mort étaient tous placés ensemble, environ 300 du temps que j'étais là, au building no. 1 à Bangkok. Y'avait trois murs à sauter. Ils m'avaient placé là, moi aussi, dans le pire endroit. De notre cellule en haut, le matin très tôt, on pouvait voir les individus qui étaient amenés pour l'exécution. Dans toutes les années que j'ai été là, c'est arrivé peut-être une seule fois qu'un gars a chigné un peu. La plupart du temps, ils venaient les chercher par deux ou par trois. Y marchaient la tête haute. Y'en a bien ici qui auraient pissé dans leur culotte. Chez nous, personne aime perdre la face, l'égo, l'orgueil mais on vient pas fous avec ça! Les Japonais, eux, (rire) c'est l'enfer», poursuit l'homme qui mène maintenant une vie rangée.


Le général à la peau foncée

«À Chiang Mai, dans le Nord, le nouveau directeur de prison avait la peau foncée parce qu'il était né dans le Sud de la Thaïlande. Ce général devait se montrer doublement compétent afin de se faire accepter. Il a donc resserré toutes les règles de sécurité de la prison. Tout était plus dur! Moi, Roland Parisien, dans ces circonstances, j'ai osé m'évader. Pis, écoute bien la shot. Après m'avoir capturé, ils ont organisé une conférence de presse. Lui, y me dé-tes-tait. Je venais de lui faire sérieusement perdre la face. Mais devant les hauts gradés du département de Correction, même s'il me haïssait à mort. y'a été obligé de me serrer la main avec un... franc sourire. Comprends-tu? Pour montrer qu'y avait pas perdu la face. De là vient l'expression rire jaune. Un sourire hypocrite!

Roland Parisien s'est basé sur son expérience avec des prisonniers de différentes cultures: des Thaïs et aussi des Chinois et des Japonais. Parmis ce dernier groupe, il a côtoyé de près un chef des yakuzas. Encore une bonne histoire à mettre sur un blogue. Ou dans un livre.

mercredi, novembre 24, 2010

Boucar Diouf nous sert son Africassée-e. Vite! Tous à table!



Dans mon blogue spécialisé sur la culture chinoise, d'ici à ce que je présente des textes sur l'humour à l'orientale, en voici un qui mérite votre attention. Écrit à partir d'une expérience vécue pas piquée des vers:

Si vous voulez passer un bon moment à vous dilater la rate, je vous recommande d’aller passer une soirée en compagnie de Boucar Diouf. Le biologiste-humoriste-fantaisiste. Nous en avons fait l’expérience – cinq personnes – et nous vous en passons un papier : rigolade garantie!

Nous l’avons vu au Cabaret-Théâtre du Vieux-St-Jean, salle conviviale de l’ex-Centrale catholique, rue Laurier. Le genre de salle qu’aime cet artiste pour un contact plus étroit avec son public. Personnellement, j’avais choisi St-Jean-sur-Richelieu parce que c’est là que je suis né, et je voulais y amener le rédacteur en chef de LusoPresse et sa conjointe. Ce fut aussi l’occasion de retrouver Louise et Claude Bissonnette, mon ami de plus longue date, mon petit voisin sur la rue Notre-Dame, mon chef de patrouille scout. Bref, un échantillon varié de spectateurs. Nous avons pu prendre nos places à temps pour 20 heures grâce à l’amabilité et à la rapidité des gens du restaurant L’Imprévu -- quelques pas plus loin sur la rue Laurier.

Sagesse du grand-père

Comment définir l’homme et son humour? Il donne un spectacle unique puisant sur ses origines africaines profondes. Malgré son doctorat en biologie avec spécialité océanographie de l’Université du Québec, il garde en lui toute la sagesse de son père octogénaire et de son grand-père. Boucar Diouf, est le sixième d'une famille de neuf enfants : six garçons et trois filles. Une sagesse composée de tradition orale, de vérités terre à terre et de gros bon sens. Un Africain de l’Ouest fier de partager ses valeurs avec les gens de sa société d’accueil. Avec des messages simples et une logique paysanne à toute épreuve. «Mon grand-père disait…»

L’autre talent de Boucar Diouf c’est son incroyable sens de l’observation de la parlure québécoise, de la mentalité et des travers de cette société. L’homme de Dakar va chercher des expressions courantes qui nous sont tellement familières qu’on en ignore le côté drôle. Un virtuose de la langue. «Un jour que j’ai loué une chambre avec ma blonde dans un hôtel de bas de gamme à Montréal, l’employé nous a demandé si on louait la chambre… pour une secousse.» Le fou rire général!

L’autre qualité nous faisant aimer l’humoriste c’est sa grande simplicité. «Voici maintenant la conférence de presse», lance-t-il après le dernier applaudissement. Il s’assoit sur un tabouret et nous invite à l’interroger sur n’importe quel sujet. Lorsque les réponses sont moins hilarantes c’est parce qu’il plonge dans sa vie privée, ses convictions et des anecdotes personnelles. Encore plus intéressant! C’est là que le docteur en biologie nous confirme que son père, Amath Diouf, est cultivateur d’arachides et analphabète, et il nous dévoile un secret : «Il ne sait pas que je fais de l’humour sur scène!»

Prof à Rimouski

Les sketches de l’ex-prof. de Rimouski (pendant huit ans) relatent le vécu d’un jeune Africain désirant vite s’intégrer dans une société blanche peu habituée à l’interculturel. Boucar va jusqu’à se marier avec une fille du pays, nommément Caroline Roy. Du fruit de leur amour naît un petit galopin nommé Anthony. Caroline apparaît donc sur la scène pour chanter et jouer de la guitare. Heureux mélange! Et quoi de plus universel que des histoires de vie de couples?

L’humour ethnique peut facilement sombrer dans les clichés et la facilité. Rien de plus facile que de faire des blagues sur le dos des Portugais, des Italiens ou des Haïtiens. Rien de cela pendant le spectacle d’une heure et trois quarts. Vers 22 heures, nous sommes allés prendre le café filtre chez Louise et Claude. L’unanimité était faite parmi nous sur l’humour inoffensif de Boucar. Claude vend de l’assurance dans la communauté amérindienne. L’ex-enseignante a acheté le livre de Boucar intitulé Sous l’arbre à palabres, mon grand-père disait… Cet ouvrage, paru à l’automne 2007 aux éditions des Intouchables est resté plus de quinze semaines dans les palmarès de ventes. Il en prépare un autre pour mars 2011 qui traitera de la faune marine dans le Saint-Laurent.

Rappelons que, depuis deux ans, le Dakarois-Gaspésien coanime avec le dynamique Francis Reddy l’émission populaire Des kiwis et des hommes tous les matins à 8h30 (reprise à 23h00) à Radio-Canada. Si vous flânez tôt le matin au Marché Jean-Talon, vous les verrez interviewer à la camera leurs invités au milieu des marchands de carottes et de tomates. À l’image des deux animateurs, toute l’équipe -- de la recherchiste Nadine Curadeau jusqu’à la maquilleuse -- accueille les invités avec beaucoup de camaraderie. Tout en parlant de bonne cuisine de divers pays, cette émission arrive à aborder des sujets très sérieux.

Pas facile de rapporter par écrit les meilleures blagues de ce spectacle intitulé L’Africassé-e. Par exemple, il dénonce le pâté chinois comme un mets raciste: «le jaune au dessus, le blanc au milieu, le foncé au fond». Il donne généreusement la moitié de ses cachets d’artiste à une fondation: sa propre fondation pour assurer ses vieux jours. « Treize ans passés dans le Bas-du-Fleuve au Québec ont fait de moi un baobab recomposé. Entre mes racines africaines et mon feuillage québécois se dresse un tronc sénégalais.»

L’ami Boucar poursuit sa fructueuse tournée de spectacles à divers endroits avec un échéancier étalé jusqu’en 2013. Pour bien choisir votre soirée inoubliable, consultez sa page: www.boucardiouf.com

samedi, novembre 20, 2010

La gastrononie chinoise bientôt à l'Unesco?




J'étais hier avec de joyeux amis dans un bon restaurant chinois de Montréal, le Mr. Ma de la place Ville-Marie. Un excellent canard avec crêpe ainsi que de tendres crevettes pour ouvrir l'appétit. Soupe aigre douce. Service à la fois cordial et sympathique. Ambiance feutrée.

Cette belle soirée me ramène à une belle nouvelle de la semaine. Honneur au repas gastronomique à la française, selon les experts de l'Unesco. C'est la première fois qu'une cuisine est inscrite au patrimoine de l'humanité. Catégorie «patrimoine immatériel.» Le gourmet français qu'on a souvent vu à TV5, Jean-Luc Petitrenaud commentait dans un topo: « C'est quand même le seul pays au monde où, tous les 10 km. vous pouvez vous arrêter et trouver des plats différents, des saveurs différentes, des traditions différentes, des croyances. Tout ça, ça s'appelle la CULTURE!»

J'applaudis à cette reconnaissance internationale. Vive nos ancêtres les Gaulois! Mais j'aimerais jeter un couac dans la mare de l'Unesco. Certes les Gardes rouges littéralement ont massacré la patrimoine matériel de leur pays pendant la Révolution culturelle, mais ils n'ont pas réussi à saccager la gastronomie. Comment se fait-il que la cuisine chinoise ne soit pas déjà inscrite à l'auguste liste de l'Unesco? Ignorance? Candidature jamais posée?

Cuisines française et chinoise n'ont absolument rien en commun, mais il suffit de voyager un tant soit peu dans le pays de Confucius pour apprécier l'art très raffiné de la table. Les spécialités régionales sont nombreuses dans ce pays presque aussi vaste que le Canada -- aussi doté de climats très différents. Si nos amis chinois se vantent souvent de leur 5 000 ans de culture, c'est vrai dans ce cas. Le canard de Pékin, le crabe de Shanghai et le cochon de lait à Canton, sans oublier les extravagances de Hong Kong. L'eau m'en vient à la bouche. Chefs chinois de tous les pays, unissez-vous! Faites-nous en profiter. Mettez-nous en plein la bouche.

jeudi, novembre 04, 2010

Grand bond en avant de la langue chinoise en France: déjà au cinquième rang


L'apprentissage de la langue chinoise fait un grand bond dans l'Hexagone. Ils étaient 2600 en 1985, puis 12 650 en 1995. En 2010, pas moins de 28 000 jeunes Français étudient cette langue dans les écoles. Parfois par «exotisme». Le chinois se classe bon cinquième après l'espagnol, l'anglais, l'allemand, l'italien et passe devant le russe, le portugais et l'arabe. Malgré un contingent de 400 enseignants, une pénurie de profs qualifiés se fait sentir. Qui parle mandarin/putonghua avec un assez bon accent pour en transmettre la bonne prononciation? De bonnes ouvertures pour des immigrants à la recherche d'un premier emploi -- aidant à leur intégration. Les Instituts Confucius vont contribuer à répandre cette langue tonale: 324 écoles dans le monde dont 27 en Afrique, indique France 2. «Plus je parle de langues, plus je me fais d'amis!». Personnellement, j'aimerais bien retrouver mon vieil ami Frédéric Plantier, un talentueux Lyonnais qui m'impressionnait par sa maîtrise du mandarin du temps que nous étions ensemble à Taipei. Qui le connaît? Merci d'avance.

mardi, octobre 26, 2010

Le maire Rob Ford: vite les pieds dans les plats !

Entendu une bonne à Radio-Canada. Le nouveau maire de Toronto a déclaré: «Les Chinois travaillent comme des CHIENS», rapporte mot à mot une journaliste à Pierre Maisonneuve. Rob Ford s'est vite mis les pieds dans les plats! Le chien dans la culture chinoise est un être vil et bas. Tout à fait le contraire dans notre culture. Les Sino-Torontois ont dû faire la grimace... de se faire comparer à des chiens. Un «compliment»? Pas du tout. Il suffit de lire quelques romans chinois comme ceux de YU Hua pour voir comment on se sert de cet animal dans les insultes. «Chien rampant» était une invective sérieuse pendant la Révolution culturelle. Ces dernières années, le chien est en quelque sorte réhabilité comme animal domestique dans la classe moyenne des villes. Heureusement! Il y a quelques années, un policier a dessiné une tête de singe sur un permis de conduire d'une personne d'origine chinoise à Brossard, si je me souviens bien. L'intention était peut-être de se moquer du conducteur, mais le singe n'est pas un mauvais animal dans la pensée chinoise. Raté! L'autre jour, j'ai entendu l'insulte «tête de cochon» adressée à un jeune danseur dans le film «Mao's Last Dancer». Un peu étonnant aussi car le cochon est un animal très sympathique en Chine. Enfin, inutile d'en rajouter contre le nouveau maire de Toronto sur ses opinions en matière d'immigration. La presse en donne déjà assez de commentaires négatifs. Souhaitons lui seulement de bonnes relations avec ses milliers d'électeurs d'origine chinoise résidant dans pas moins de CINQ quartiers chinois dans la Ville-Reine. Peut-être se fera-t-il photographier en train de déguster de la bonne cuisine du pays de Confucius? (Sûrement pas de la viande de chien, à moins qu'un chef décide de lui en faire manger.)

lundi, octobre 25, 2010

Un goulag (oublié) en livre et en film

La couverture de ce livre récent laisse deviner un banal harlequin. Petit roman rose? Un documentaire tout gris de WANG Bing sur la désolation et la tristesse des vieilles usines d'État du Nord-Est de la Chine pouvait lasser par sa longueur interminable. À l'ouest des rails exigeait beaucoup de patience.

En fait, au delà des premières impressions, ce livre et Wang Bing nous arrivent avec des révélations chocs. Woman from Shanghai et The Ditch (le fossé) nous révèlent l'horreur du goulag de Jiabiangou (province de Gansu) où près de 3 000 «éléments de droite» ont été emprisonnés entre 1957 et 1960. Un grand nombre de ces prisonniers sont morts de mauvais traitements et de famine.

J'ai lu le livre dès sa parution en 2009. YANG Xianhui y relate le récit de quelques survivants. Une malheureuse «femme de Shanghai» y livre un terrible témoignage, une histoire de vie gâchée. Une histoire parmi une douzaine.

Un bon ami cinéphile qui est allé voir The Ditch à la Cinémathèque québécoise a commencé à me raconter ce qu'il avait vu. Il m'a fallu un moment pour me rendre comte que le livre et le film détaillaient le même camp de la mort de Jiabiangou. Chapeau à WANG Bing qui a eu le génie et surtout le courage de s'attaquer à un tel sujet. Tabou? Pas complètement, semble-t-il. Je regrette de ne pas avoir vu ce documentaire. Ni celui-là. Ni Feng Ming, autre production de WANG Bing -- qui nous a fait le plaisir de venir donner une leçon de cinéma à la Cinémathèque. En attendant de voir les images, faut lire le bouquin!

dimanche, octobre 24, 2010

La magie des lanternes 2010


Au Jardin de Chine du Jardin botanique (Montréal) cette année, c'est l'occasion d'admirer le magnifique spectacle des lanternes. La foule se masse pour voir ce festival des lumières. Un village chinois du 12e siècle y revit grâce à des personnages grandeur plus que nature. L'inspiration provient d'un chef-d'oeuvre de la peinture chinoise, Le long du fleuve, datant de la dynastie Song. Une belle surprise comparée à notre visite remontant à quelques années. Bravo aux responsables du Jardin de Chine en cette année du Tigre.